
Les différentes formes de divorce
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I) Les divorces par consentement mutuel
A) Le divorce par consentement mutuel extrajudiciaire
Le divorce par consentement mutuel extrajudiciaire est un acte sous signature privée, contresigné par avocats et déposé au rang des minutes d'un notaire. Il n’implique aucune intervention du juge. Il est prévu par les articles 229-1 à 229-4 du Code civil.
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Les conditions du divorce par consentement mutuel extrajudiciaire
Ce divorce peut être demandé par les époux lorsque 3 conditions sont réunies :
La première condition, selon l’article 229-1 du Code civil, est que les époux doivent s’entendre sur le fait de divorcer, ainsi que sur ses conséquences personnelles et patrimoniales. Ces conséquences sont, par exemple, la liquidation du régime matrimonial, la répartition des biens, la prestation compensatoire, la conservation du nom, la résidence des enfants, la pension alimentaire…
La deuxième condition à respecter, selon l’article 229-2 du Code civil, est que les époux ne doivent pas être placés sous un régime de protection judiciaire. Ces mesures sont : la tutelle, la curatelle, le mandat de protection future, l’habilitation familiale, ou encore, la mesure de sauvegarde
Enfin, la troisième et dernière condition est que les enfants mineurs du couple ne doivent pas demander à être entendus par un juge, selon l’article 229-2 du Code civil. Si les enfants mineurs demandent à être entendus, les époux devront passer par le divorce par consentement mutuel judiciaire, étudié ci-dessous.
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La procédure du divorce par consentement mutuel extrajudiciaire
La procédure d’une tel divorce se déroule en 4 étapes, prévues par l’article 229-3 du Code civil et l’article 229-4 du Code civil. Chacun des époux doit être accompagné de son avocat. En effet, le choix d’un avocat commun pour les deux époux n’est plus possible dans ce type de divorce depuis la réforme du divorce par consentement mutuel du 1er janvier 2017.
La convention peut être remise en cause conformément aux causes de nullités prévues par le droit des contrats prévues par l’article 1128 du Code civil.
B) Le divorce par consentement mutuel judiciaire
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Les conditions du divorce par consentement mutuel judiciaire
Les époux sont dans l’obligation de passer par le divorce par consentement mutuel judiciaire lorsque leurs enfants mineurs demandent à être entendus par le juge.
Les époux doivent être en accord sur le principe et les conséquences de la rupture, selon l’article 230 du Code civil. De plus, ils ne doivent pas être sous un régime de protection juridique, comme le prévoit l’article 249-4 du Code civil.
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La procédure du divorce par consentement mutuel judiciaire
La procédure d’un tel divorce se déroule en 4 étapes, conformément aux articles 1088 à 1105 du Code de procédure civile.
La requête en divorce ne peut être remise en cause que dans 5 cas limitatifs selon la jurisprudence (Cass. Civ. 2ème, 6 mai 1987, n°86-10.107, Publié au bulletin ; Cass. Civ. 1ère, 5 novembre 2008, n°07-14.439). Elle peut être remise en question dans le cadre :
· D’un pourvoi en cassation selon l’article 1103 du Code de procédure civile,
· D’un recours en interprétation selon un arrêt de 1984 (Cass. Civ. 2ème, 25 janvier 1984, n°82-14.595),
· D’une demande en partage complémentaire selon un arrêt de 2000 (Cass. Civ. 2ème, 27 janvier 2000, n°97-14.657),
· D’un recours en révision selon l’article 596 du Code de procédure civile,
· D’une tierce opposition selon l’article 1104 du Code de procédure civile.
II) Les divorces contentieux
A) Le divorce accepté
Selon les articles 233 et 234 du Code civil, dans le cadre d’un divorce accepté, les époux acceptent le principe de la rupture du mariage, mais sont en opposition sur les conséquences qui en découlent telles que, par exemple, la liquidation du régime matrimonial, la répartition des biens, la prestation compensatoire, la conservation du nom, la résidence des enfants, la pension alimentaire
Ainsi, le rôle du juge est de trancher ces désaccords.
B) Le divorce pour altération définitive du lien conjugal
Selon les articles 237 et 238 du Code civil, les époux ont cessé leur communauté de vie entre eux depuis au moins 1 an au moment de la demande en divorce. Ce délai était de 2 ans avant 2021.
Selon une jurisprudence constante, il s’agit d’une séparation tant matérielle qu’affective des époux (Cass. Civ. 2ème, 30 janvier 1980, n°79-12.470) dont l’appréciation est laissée aux juges du fond (Cass. Civ. 1ère, 25 novembre 2009, n°08-17.117).
C) Le divorce pour faute
Dans le cadre d’un divorce pour faute, prévu par les articles 242 à 246 du Code civil, les époux ne sont en accord sur rien. L’un des époux reproche à l’autre une/des fautes, ou ils se reprochent mutuellement des fautes.
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Les conditions du divorce pour faute
Il existe 4 conditions cumulatives pour caractériser la faute :
La première condition est que les faits sont constitutifs d’une violation des devoirs et des obligations du mariage, que ce soit les devoirs nommés, prévus légalement par les articles 212 à 236 du Code civil, ou innomés, dégagés au fil du temps par la jurisprudence. Par exemple, sont des devoirs innomés la non-concurrence entre les époux (Cass. Civ. 1ère, 17 octobre 2007, n°06-20.701), la loyauté entre époux (Cass. Civ. 1ère, 25 mars 2009, n°08-11.126), ou encore, la tempérance dans le comportement des époux (Cass. Civ. 1ère, 23 février 2011, n°09-72.079).
Conseil pratique : de nombreuses décisions de jurisprudences sont rapportées sous l’article 242 du Code civil.
La deuxième condition est que la violation de ces devoirs et obligations doit être grave et renouvelée (Cass. Civ. 1ère, 18 mai 2011, n°10-12.912) et ne peut ainsi pas être ponctuelle.
La troisième condition est que le conjoint ayant fait la/les faute(s) doit avoir conscience de violer les devoirs et obligations du mariage. Il ne doit ainsi, par exemple, pas être sous l’emprise d’un trouble mental (Cass. Civ. 1ère, 12 nov. 2009, n°08-20.710).
La quatrième et dernière condition est que le maintien de la vie commune doit être rendu intolérable.
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Les moyens de défense offerts au défendeur
L’époux défendeur peut discuter la faute reprochée par l’époux en demande par 3 moyens différents.
Le premier moyen de défense est par la réconciliation, définie par l’article 244 du Code civil. Toutefois, en cas de nouvelles fautes du conjoint après la réconciliation, l’époux victime peut toujours rappeler les anciennes fautes de son conjoint au soutien de sa demande de divorce. La réconciliation, pour être effective, doit remplir 2 conditions cumulatives :
La première condition est que la réconciliation doit être suivie d’un maintien ou d’une reprise de la vie commune.
La seconde condition est que la réconciliation doit naître d’une intention libre et éclairée de l’époux victime de pardonner l’autre.
Le deuxième moyen de défense est l’excuse. Dans ce cadre, l’époux défendeur estime que ses fautes doivent être excusées par les fautes du demandeur, selon l’article 245 du Code civil.
Si ses fautes excusent celles du demandeur, alors la demande en divorce pour faute peut être rejetée ou le divorce peut être prononcé aux torts partagés. Par exemple, l’abandon du domicile par une épouse peut être excusée par les violences de son mari, et ainsi permettre de rejeter la demande en divorce du mari (Cass. Civ. 1ère, 15 mai 2013, n°12-13.667).
Si ses fautes n’excusent pas celles du demandeur, alors le divorce pourra être prononcé aux torts exclusifs du défendeur ou aux torts partagés des deux époux.
Le troisième moyen de défense est la demande reconventionnelle en divorce, prévue par l’article 245 du Code civil. Il s’agit pour l’époux défendeur de former un divorce pour faute en réponse à celle qu’il reçoit. Cette demande reconventionnelle pourra alors aboutir à 3 issues différentes.
La première issue est en l’absence de caractérisation de la faute, alors les 2 demandes en divorce peuvent être rejetées.
La deuxième issue est en cas de fautes d’égale intensité, alors le divorce peut être prononcé aux torts partagés.
La troisième issue est en cas de fautes pardonnées ou excusées par l’autre époux, alors le divorce peut être prononcé aux torts exclusifs de l’un des époux.
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L’actualité européenne autour du divorce pour faute
Récemment, la Cour européenne des droits de l’Homme a rendu une décision touchant directement le divorce pour faute, et plus précisément, sur le devoir conjugal des époux mariés.
En droit, l’article 215 du Code civil impose une obligation de communauté de vie des époux. La jurisprudence de la Cour de cassation a, par la suite, précisé cette notion : elle doit s’entendre d’une communauté de vie matérielle entre époux, mais aussi d’une communauté de vie affective, induisant l’obligation de d’entretenir des relations charnelles avec son conjoint pendant toute la durée du mariage.
Dans une affaire H.W contre France du 23 janvier 2025, la Cour européenne des droits de l’Homme a jugé : « que le devoir conjugal, tel qu’il est énoncé dans l’ordre juridique interne et qu’il a été réaffirmé dans la présente affaire (paragraphes 14 et 19 ci-dessus), ne prend nullement en considération le consentement aux relations sexuelles, alors même que celui-ci constitue une limite fondamentale à l’exercice de la liberté sexuelle d’autrui ».
La doctrine se questionne alors sur l’avenir du divorce pour faute : est-il voué à disparaître ?
POUR ALLER PLUS LOIN voir l’article “L’affaire H. W c. France : La notion de “devoir conjugal” dans le cadre du mariage” de L. DE WEINDEL du 24 février 2025 sur Libdedroit.